La première édition du forum annuel sur la taxation du tabac en République démocratique du Congo (RDC) a vécu ! Ce forum a été organisé par l’organisation non gouvernementale Initiative Locale pour le Développement Intégré (ILDI), et le Bureau de Liaison avec le Parlement de la Conférence Épiscopale Nationale du Congo (BLP/CENCO), mardi 7 novembre à Kinshasa. Il a réuni plusieurs acteurs et décideurs concernés par la lutte contre le tabac en RDC, sous le thème : « La fiscalité du tabac en RDC : état des lieux et enjeux ».
A en croire les organisateurs de ces assises, ce premier forum anti-tabac s’est fixé comme objectif de plaider pour des réformes fiscales efficaces sur le tabac et ses dérivés en RDC. Ceci a pour finalité de diagnostiquer le régime fiscal actuel sur le tabac appelé ad valorem, afin d’en déceler les faiblesses et de proposer des recommandations devant aboutir au changement du système de taxation efficace en RDC.
« Pour nous permettre d’atteindre les objectifs de la phase 2 du projet plaidoyer fiscal sur la taxation du tabac en RDC, ce forum a pour mission de diagnostiquer le régime fiscal actuel sur le tabac, en vue de déceler les faiblesses pour proposer des recommandations qui devront plaider pour le changement d’une taxation efficace en RDC, qui est le régime fiscal spécifique. Nous restons positifs que cette première édition atteindra les résultats attendus à savoir, les pénalités à fixer pour le commerce illicite du tabac en RD », a souligné Harley Kabamba, Coordonnateur National de ILDI-ONGD.
Malgré la volonté politique du gouvernement et du parlement congolais, la mise en œuvre de ces textes de lois est souvent butée à plusieurs pesanteurs parmi lesquelles, l’ingérence de l’industrie dans l’élaboration et la mise en œuvre des politiques nationales sur le tabac, la contrebande des produits du tabac et le système de taxation en vigueur inefficace. Ces faits ont comme conséquence, la faible augmentation du prix des cigarettes ainsi que la faible mobilisation des recettes issues des taxes existantes sur le tabac.
« En perspective du renforcement des mesures fiscales sur les produits du tabac par le vote d’une loi sur la taxation, les meilleures pratiques en matière de politique de taxation du tabac, il est nécessaire de faire asseoir la mise en œuvre d’un cadre simple de taxe d’accise, d’augmenter le prix du tabac, puis concevoir les taxes de manière à réduire l’accessibilité à la consommation », a martelé Jean Paul Mulyanga, du Bureau de Liaison avec le Parlement de la Conférence Épiscopale Nationale du Congo (BLP/CENCO).
Le tabac, un frein pour le développement ?
Le tabac, en plus de tuer silencieusement des milliers de personnes chaque année, fait échapper des milliards de dollars américains au trésor public. Un véritable manque à gagner pour le pays en termes de main d’œuvre et d’argent. D’où, la nécessité de se pencher sur cette question.
« Selon des études, la RDC perd au moins 15 milliards de dollars américains par an, suite au tabagisme. Sur ce, notre souhait est que ce forum se passe dans des meilleures conditions. Chacun est appelé à mettre la main dans la patte afin que nous réfléchissions ensemble pour trouver des solutions durables à ce problème », a indiqué le Représentant du Ministre des Finances à ces assises, l’Expert Bellarmin Kimbulu Lubemba.
ILDI ONGD n’entend pas baisser la garde tant que cette question ne trouvera pas de réponse concrète. Raison pour laquelle elle poursuit ce combat salvateur pour la Nation toute entière. Elle exhorte les décideurs à tenir compte de la Société civile dans les instances de prise de décision, telle que l’indique la convention cadre pour la lutte antitabac. Ses préambules reconnaissent le rôle de la Société civile.
« Nous ne cesserons pas de plaider pour une taxation adaptée à notre économie. L’objectif, en dehors du profit et des revenus, est de sauver des vies des populations. Comme la révision du code des accises est en cours, c’est une opportunité pour nous. Sur ce, nous demandons qu’on nous donne l’opportunité d’intervenir pour faire des propositions. Ceci est un problème de santé publique. Alors, l’autorité ne peut siéger sans y mêler la Société civile », a souligné Godefroid Mboyo, responsable des Programmes économiques à ILDI ONGD et Manager du Projet.
Réussir la lutte de la taxation du tabac en RDC passe par la bonne qualité des agents des services d’assiettes. Ceci demeure une préoccupation majeure pour les gardiens des portes d’entrées du pays.
« Un droit n’est droit que quand on sait le défendre, dit-on. Au niveau de la DGDA, nous ne sommes là que pour taxer. Les autres décisions concernent les Ministres des Finances et de la Santé. Si aujourd’hui il y a de la contrebande, c’est parce que le problème de formation se pose. Les agents doivent avoir un niveau aguerri pour aboutir au bon résultat », a martelé Gustave Intemo, sous-directeur des autres produits et accises à la DGDA.
La lutte anti-tabac demeure multisectorielle. Toutes les parties devraient s’impliquer davantage pour aboutir à de meilleurs résultats. Cette première édition du forum annuel sur la taxation du tabac en RDC a été marquée par la présentation et le lancement de l’étude sur l’ingérence de l’industrie du tabac dans l’élaboration et la mise en œuvre des politiques anti-tabac en RDC. Cette étude menée depuis 2022 documente les entraves que connait cette lutte.
Les participants à ce forum ont échangé sur le système de taxation actuel, l’interférence et le commerce illicite du tabac au pays. Un exemple concret est le droit à l’exonération dont bénéficient les corps diplomatiques sans un seuil fixe. « Le chapitre 6 sur les exonérations n’autorise pas aux missions diplomatiques d’importer les cigarettes en RDC. Pourtant, ils mettent ces produits sur le marché au vu et au su de tous. C’est inquiétant ! Maintenant que le code des accises est en train d’être révisé, c’est le moment de se pencher sur cette question car ils sont dans cette activité depuis plusieurs années », a insisté Godefroid Mboyo.
Sarah MANGAZA
